Maladie d’Alzheimer: le rôle essentiel de l’entourage
Par Marie-Paule Dessaint, docteure en sciences de l’éducation, auteure, conférencière et biographe
En (re) construction 3 novembre 2023
La maladie d’Alzheimer est une maladie neurodégénérative qui conduit au déclin progressif de la mémoire, tout particulièrement celui de la mémoire épisodique (la mémoire de l’histoire personnelle). La personne atteinte présente des problèmes d’orientation (elle se perd dans son environnement) et il lui est très difficile de former de nouveaux souvenirs, bien que cela ne soit pas impossible. Irréversible, cette maladie peut prendre plus de 10 ans avant de se manifester au quotidien
Dans cet article, je vous propose une liste d’énoncés permettant de déceler si oui ou non une personne est atteinte de la maladie d’Alzheimer (les signes précurseurs), puis une «preuve» que cette maladie n’est pas héréditaire, dans la majeure partie des cas.
Une fois le diagnostic posé, il est évident que l’entourage humain et l’environnement physique jouent un rôle déterminant dans l’exacerbation des symptôme ou, au contraire, dans leur réduction.
L’empathie et l’hapectomie sont au coeur de cette différence.
Il faut savoir aussi que de nombreux ennemis de la mémoire, que l’on peut combattre, notamment notre mode de vie, nous font croire, souvent, que nous sommes atteints de cette maladie alors que ce n’est pas le cas
La maladie d’Alzheimer est toujours présentée comme quelque chose d’effroyable, une mort psychique à petit feu, alors que, pendant qu’il est encore temps, on peut miser sur les fonctions préservées et stimuler la personne par toutes sortes d’activités.
L’idéal, comme je le mentionne dans mes livres et mes formations, est de commencer à stimuler notre mémoire, très tôt, alors que tout va bien, afin de se constituer une bonne réserve cognitive.
Et si un diagnostic est posé, il faudra apprendre rapidement et sans cesse, à contourner les difficultés au fur et à mesure de leur apparition.
C’est alors que le rôle de l’entourage devient fondamental afin que la personne atteinte ne baisse pas les bras, ne se sente pas rejetée au point de se laisser aller (voir plus loin les vertus de l’haptonomie).
L’accent sera mis aussi sur les capacités physiques et sportives préservées, par exemple, la natation, le tennis, la marche, le jogging…
Il existe aussi des ateliers mémoire spéciaux pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ainsi que des ateliers de stimulation des sens, par la musique, la couleur, la lumière, l’art…
La présence d’animaux (thérapie assistée par des animaux), ainsi que la reproduction de situations vécues dans le quartier de la personne : trajets, téléphone, achats…
Mais tout cela, sans stress
Quelques signes précurseurs de la maladie d’Alzheimer
Si vous vous inquiétez à propos d’une de vos proches ou de vous-même, vérifiez cette liste
En attendant de pouvoir consulter un médecin ou un spécialiste de la mémoire, voici quelques signes précurseurs relevés par L’association Alzheimer américaine
Aux pages 100 et 101 de mon livre Le Cerveau. Comment entretenir votre mémoire et votre intelligence ainsi que dans Rajeunir sa mémoire après 50 ans. Principes et stratégies à la portée de tous, vous trouverez des questionnaires plus élaborés pour vérifier si vous avez vraiment des problèmes de mémoire et sur quels facteurs vous pouvez intervenir. Parce que, parfois, les problèmes de mémoire découlent d’autres problèmes de santé, y compris la prise de certains médicaments.
Principaux signes précurseurs de la maladie d’Alzheimer
– Pertes de mémoire à propos de ce qui vient de se passer ou être dit.
– Impossibilité de restituer une information déjà stockée dans la mémoire à long terme.
– Difficultés à retrouver des objets ou à exécuter des tâches pourtant familières : préparer un repas, utiliser l’aspirateur ou le four à micro-ondes.
– Oubli de mots simples, communs et usuels.
– Oubli, parfois, du nom des enfants et des petits-enfants.
– Substitution de mots en parlant ou en écrivant, rendant ce que l’on veut exprimer incohérent.
– Discussion, au présent, comme si des faits anciens étaient en train de se passer, par exemple attendre pour le repas le conjoint décédé 15 ans plus tôt.
– Difficultés à s’orienter dans un environnement familier alors que cela était naturel auparavant.
– Diminution ou perte du bon sens (sens commun), par exemple dépenser sans compter ou porter des vêtements d’hiver en plein été.
– Perte de la capacité d’abstraction, par exemple ne plus réussir à payer ses factures ou à faire son budget.
– Cyclothymie, c’est-à-dire se mettre en colère de façon impressionnante et inattendue, sans raison apparente.
– Changement de personnalité, par exemple devenir plus suspicieux, angoissé, confus et dépendant des autres.
– Passivité, notamment rester inactif pendant des heures, ne plus s’adonner à ses activités habituelles et ne plus prendre d’initiatives.
La mémoire immédiate disparaît peu à peu et la personne éprouve des difficultés avec les dates et les chiffres, notamment, mais elle conserve son vocabulaire.
Elle ne reconnaît pas les objets ou les confond, etc.
Une maladie héréditaire dans environ 1% des cas
Globalement, on peut dire que la maladie d’Alzheimer est surtout liée au vieillissement, à l’environnement, aux effets de certaines maladies et à un manque d’entretien du cerveau.
Si un de nos parents a développé cette maladie, surtout tardivement, nous ne sommes pas condamnés pour autant.
Lorsqu’elle est héréditaire, la maladie d’Alzheimer se transmet d’une génération à l’autre et les signes de sa présence sont très précoces, autour de la quarantaine.
Le pourcentage indiqué ici varie selon les spécialistes dont j’ai consulté les écrits et les sites : moins de 0,1 %, 1 %, 5 %…
Le site Alzheimer-génétique, créé par le laboratoire de génétique moléculaire de la Faculté de Médecine et Pharmacie de Rouen, explique parfaitement ce qu’il en est, notamment sur quels gènes se trouvent les marqueurs de la maladie et à quel moment et de quelle façon ils s’expriment.
Vous verrez aussi dans quelle proportion elle est héréditaire.
L’effet du stress
Le stress est l’ennemi numéro un de la mémoire et, à plus forte raison, de la maladie d’Alzheimer.
Il faut donc éviter de précipiter les choses, de poser trop de questions, de faire des reproches, de se fâcher si la personne atteinte commet trop d’erreurs.
Il arrive alors qu’elle ne reconnaisse plus celui ou celle qui la brusque ainsi, même s’il s’agit de son conjoint ou d’un de ses enfants.
Je me souviens, par exemple, qu’une de mes sœurs, qui s’occupait beaucoup de notre maman, atteinte de la maladie d’Alzheimer à la toute fin de sa vie, la bombardait parfois de toutes sortes de mots, de recommandations et de questions, parfois avec peu de délicatesse.
Un jour, ma sœur s’est un peu fâchée (car épuisée par tant de responsabilités et sa vie personnelle entre parenthèses) car notre maman ne la reconnaissait plus et l’avait même prise… pour sa propre mère : notre grand-mère.
Pour la personne atteinte, il s’agit d’une façon de se protéger.
Pour réduire le stress, il vaut mieux ne pas changer les habitudes de la personne atteinte, notamment la marque de ses produits de beauté ou d’entretien de son domicile.
Il vaut mieux également éviter de se déplacer avec elle dans des endroits qu’elle ne connait pas, par exemple l’emmener en voyage, en croyant lui faire plaisir.
L’important est de trouver tous les moyens possibles de lui rendre la vie facile, douce et agréable, sans précipitation, sans énervement et sans jugement.
Tout ne doit surtout pas tourner autour de sa maladie: environnement, discussions, soins…
Les vertus de l’empathie et de l’haptonomie
L’entourage peut contribuer à exacerber les symptômes de la maladie d’Alzheimer ou à les atténuer
Lorsque tout tourne autour de la maladie, des pertes de capacité, des traitements, des médicaments et que la personne est considérée et traitée comme une malade, une démente, cette ambiance ne fait que qu’accentuer le sentiment d’être rejetée. Alors, les symptômes s’exacerbent
Dans le livre de Boris Cyrulnik, De chair et d’âme, un passage m’a particulièrement intéressée parce qu’il traite du rôle que l’entourage d’une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer peut jouer dans l’exacerbation des symptômes, ou, au contraire, dans leur atténuation.
Même s’il date de 2006 (N. éd. 2014), ce livre est, à mon avis, incontournable.
On peut y lire notamment que l’empathie diminue les symptômes de la maladie
Voici deux exemples
Les aidants…
– laissent la personne s’exprimer totalement et l’encouragent même à continuer par leurs paroles ou leurs mimiques.
– la laissent répéter et répéter encore les mêmes souvenirs du passé comme s’ils se passaient là, maintenant.
L’haptonomie: toucher sans diriger
Il s’agit d’une approche relationnelle et tactile qui ne dirige jamais, qui ne soumet jamais, mais qui guide, qui accompagne, qui soutient
Cet article du site Passeport Santé explique parfaitement ce qu’est l’haptonomie et comment elle est pratiquée (comment se déroule une séance).
On peut y lire notamment que:
L’haptonomie permet d’établir des relations interpersonnelles équilibrées et fluides où l’on peut sans crainte s’exprimer de façon authentique, exprimer ses besoins affectifs dont le plus essentiel est celui de se sentir inconditionnellement reconnu pour qui l’on est. Dès les premières séances, la personne découvre l’autre versant, à savoir ce qui, dans son histoire personnelle l’a amenée à se méfier, à craindre l’autre et de dire ce qu’elle ressent vraiment
Vous pourriez aimer lire aussi cet article consacré aux souhaits de fin de vie
Dont l’haptonomie dans le livre La mort intime de Marie de Hennezel
Je viens de lire La mort intime de la psychologue clinicienne Marie de Hennezel, qui a travaillé pendant 10 ans dans un service de soins palliatifs. Ce livre n’est pas récent mais criant d’actualité et d’humanité.
J’y ai recencé les principaux souhaits des personnes malades en fin de vie. Je tire également ces desiderata de l’ouvrage de Larry Rosenberg, Vivre à la lumière de la mort, de la vieillesse et de la maladie, de l’article d’Yves Sciama Soins palliatifs: la vie malgré la mort, ainsi que de la consultation de plusieurs sites web consacrés à ce sujet.
Les souhaits de fin de vie (extrait de «Cap sur la retraite»)