Relire sa vie… Un puissant processus lors des séances de coaching
Découvrir aussi l’approche narrative
Par Marie-Paule Dessaint, Ph.D., auteure, conférencière et biographe
Cet article complète et reprend quelques idées clés de Écrire et relire sa vie avant d’en ouvrir un nouveau chapitre
Il explique aussi comment je fonctionne parfois avec les personnes qui me consultent pour les accompagner dans une période de transition de vie en utilisant l’écrit pour mieux comprendre ce qu’il leur arrive et ce qu’ils veulent changer. J’aime aussi leur expliquer, quand tout ne va pas bien, à quel point notre identité peut être influencée par ce que les autres racontent à notre sujet. Et nous aussi… à notre sujet!
Je recourais beaucoup à cette façon de procéder lorsque j’étais coach des transitions de vie à temps complet.
Tout le cycle de la vie adulte
Quand j’ai écrit mon livre Relire sa vie. 21 récits pour vous guider, je voulais démontrer comment la crise du milieu de la vie non résolue peut en entraîner une autre, plus difficile encore, au moment de l’entrée dans la retraite.
Je voulais illustrer mes propos de témoignages d’une ou deux personnes dans la quarantaine et la soixantaine.
En fait, j’en ai obtenu 21 qui couvraient TOUT le cycle de la vie adulte. Ils illustraient aussi parfaitement ce que les spécialistes écrivent sur le sujet, notamment E. Erikson, C. G. Jung, G. Vaillant, D. et J. Levinson.
Ces récits ont clairement illustré à quel point le fait d’escamoter ou d’ignorer le processus d’individuation, dès le début de la quarantaine, peut avoir des répercussions catastrophiques dans l’immédiat et une fois à la retraite. Plus tard aussi au cours du vieillissement.
Je suis à la croisée des chemins et je ne sais pas trop ce que je dois faire ou abandonner. James, 39 ans
Je relis mon journal intime d’il y a 15 ans. Je constate que mes difficultés et insatisfactions d’alors sont les mêmes aujourd’hui. Ma lucidité d’autrefois m’étonne. Pourquoi n’ai-je pas compris à cette époque ce qui était en train de se tramer à l’arrière-plan? Maggy, 41 ans
Je n’avais jamais pensé à relier ma soixantaine au mitan de ma vie. Mais quand je repense à mes 40 ans, où là, en effet, tout a commencé à être sérieusement chamboulé, je me rends compte que certains de mes questionnements actuels rejoignent ceux que j’ai eus à cette période. Je ne voulais pas les voir. Alice, 61 ans
Je veux me sentir encore utile en transmettant ce que j’ai appris avant de passer dans l’éternité. Charles, 82 ans
Récit de vie et relecture de vie
– La relecture de vie est différente du récit de vie: biographie, autobiographie, mémoires.
– Le récit de vie est réalisé pour les autres et pour laisser quelque chose de soi derrière soi, quitte à les enjoliver un peu et à omettre certains faits de moins grande fierté.
– La relecture de vie ne s’adresse qu’à soi, dans un premier temps. Elle est donc écrite sans complaisance, dans le but d’y trouver ou d’en tirer quelque chose, par exemple, la source de difficultés et de résistances, des réponses à des questions identitaires et existentielles, des pistes d’action dans le changement…
Je découvre alors l’approche narrative
L’approche narrative de Michael White et David Epston part du principe que notre identité est influencée par des plaintes et des histoires récurrentes, le plus souvent négatives, que nous nous racontons à notre sujet
Notre identité est aussi conditionnée par nos relations avec les autres et de ce qu’ils racontent à notre propos
À force de prendre toute la place dans nos pensées, ces histoires finissent par nous enfermer.
Une fois ces problèmes extériorisés, il est possible de les déconstruire, puis de reconstruire des histoires alternatives.
Ces histoires alternatives nous permettent de reprendre contact avec nos rêves et nos aspirations ainsi qu’avec nos ressources cachées qui n’étaient pas prises en compte dans l’histoire dominante jusque-là.
L’étape suivante consiste à réécrire (décrire par écrit) sa vie idéale, ainsi que son moi idéal afin de les traduire en objectifs, puis en un plan d’action.
– Écrire : déposer sur papier, des faits, des émotions. Raconter sa vie.
– Relire : chercher le sens, débusquer les blocages, sortir le problème de soi pour mieux l’analyser et comprendre. Trouver des réponses.
– Réécrire : décrire le moi idéal, la situation idéale, puis élaborer des objectifs de changement et un plan d’action.
Un outil puissant de coaching: relire sa vie, puis la réécrire pour mieux la reprendre en main
Je présente ici ma propre vision de ces trois étapes liées à l’écriture de soi, telles que je les ai adaptées et les applique avec mes clients.
Elle n’est pas forcément conforme à ce que l’on peut lire dans les ouvrages spécialisés.
L’écrit reste et les pensées s’envolent
Il est possible, bien sûr, de relire sa vie et de la réécrire verbalement lors des séances de coaching et de thérapie ou encore mentalement, juste pour soi.
Plus une personne vieillit, plus la relecture de sa vie s’impose d’elle-même à travers des souvenirs qui reviennent sans cesse à sa conscience sans y avoir été convoqués.
Arrivés à 85 ans, 80% des gens sont ainsi envahis par leurs souvenirs d’autrefois.
Cette étape du grand cycle de la vie est donc propice à l’écriture du soi (autobiographie, mémoires, etc.).
Cela permet notamment à la personne d’accepter son cycle de vie comme celui qui lui était destiné, malgré les pertes, les échecs et les coups durs et d’en comprendre le sens et l’évolution.
Ce sont surtout ses souvenirs de jeunesse, entre 10 et 30 ans, qui reviennent le plus fréquemment car ils ont largement contribué à façonner son identité.
Cette période de la vie est en effet remplie de «premières fois» (premier diplôme. premier amour, premier emploi, premier mariage).
Je privilégie l’écrit car il laisse des traces…
C’est aussi un espace intime où l’on peut, loin des regards extérieurs, déposer à plat et sans retenue les émotions, les faits, les blessures et les bonheurs, un peu en désordre, au fur et à mesure où ils adviennent, sans avoir à les maquiller.
On peut y revenir plus tard afin de les compléter, de les agencer en un ordre logique ou de les effacer.
L’étape suivante consiste à les analyser avec une certaine distance, un peu comme si nous lisions notre vie par-dessus notre propre épaule.
Nous devenons en fait notre propre thérapeute. L’écrit peut aussi être partagé si on en ressent le besoin.
Quelques applications
– Le récit et la relecture de vie peuvent être réalisés en solo, sans être accompagné par un coach et un thérapeute.
– Souvent, avec le recul, ils permettent de dédramatiser une situation et de trouver soi-même des réponses et des solutions à nos problèmes, ce qui évite de se faire accompagner.
– Réalisés avant la première séance de coaching d’écriture ou entre chaque séance, comme le font certains de mes clients, ils permettent de travailler directement sur l’essentiel, sans s’éparpiller.
Certains ne me montrent d’ailleurs pas leur récit de vie, par peur de «se mettre à nu».
Ou ils le font beaucoup plus tard.
D’autres personnes arrivent avec leur biographie terminée et comptent bien trouver le fil conducteur de leur vie et l’origine de leurs difficultés en l’analysant avec moi.
Lorsque la personne travaille à distance, sans me rencontrer, dans une forme d’anonymat, elle tend à se dévoiler totalement, bien au-delà de ce qu’elle aurait probablement fait en ma présence.
Suite à cet «examen de vie», la majorité des gens opèrent des changements majeurs dans leur existence.
Faire aussi un bilan de compétences

Apprendre sans stress, faire un bilan de compétences en entreprise, etc.
Le récit de vie et la relecture de vie peuvent être utilisés dans différents contextes, par exemple au moment de faire un bilan de compétences avant de chercher un nouvel emploi.
On peut y recourir aussi en entreprise, lorsque les équipes de travail éprouvent des difficultés.
L’accent est mis alors sur les forces, les bons coups et ce qui marche le mieux plutôt que sur les problèmes à résoudre.
On décrit ensuite la façon idéale dont on aimerait que les choses se passent, autant sur le plan personnel que celui du groupe.
Et on passe à l’action.
Plusieurs de ces applications sont exposées dans le livre Comprendre et pratiquer l’approche narrative, publié en 2009 sous la direction Pierre-Blanc-Sahnoun et Béatrice Dameron, InterÉditions-Dunod
Alors? À quand remonte votre dernier rendez-vous avec vous-même pour faire le point?
Voici quelques questions que vous pourriez vous poser pour organiser le récit de votre vie
Quelques questions pour «organiser» votre récit de vie (autobiographie)